Page 69 - Livre_MOW2022_FR
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L’océan absorbe une partie de l’excédent de CO
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de l’atmosphère, engendrant des effets visibles, ADOPT A FLOAT
comme la montée des eaux. Avez-vous documen- Depuis 10 ans, ce programme éducatif créé par le laboratoire
té des effets moins visibles impactant la biologie de Villefranche-sur-Mer permet à des classes françaises,
de l’océan ?
Si l’océan est plus chaud, il est moins brassé et les d’outre-mer ou d’autres pays, d’adopter un robot sous-marin,
eaux profondes reviennent moins souvent à la surface. de suivre les données envoyées en temps réel et de recevoir
Or, pour pousser, le phytoplancton, qui est la prairie un accompagnement scientifique qui les sensibilise aux
de l’océan, a certes besoin de la lumière du soleil, problématiques océaniques. En 2022, 40 classes françaises ont
mais aussi d’engrais naturels (nitrates) réinjectés à la adopté un flotteur Argo.
surface depuis les couches profondes de l’océan. De
ce fait, nous pensons que le réchauffement de l’océan
va freiner la remontée de cette source d’engrais na-
turels, générant potentiellement une raréfaction du
phytoplancton, ce qui pourrait à terme perturber les
chaînes alimentaires marines.
Que devient un flotteur Argo en fin de vie ?
Un flotteur arrive en fin de vie quand ses batteries sont
vides. Au milieu du Pacifique ou en Antarctique, on ne
peut aller le récupérer. Cinq ans après sa mise à l’eau,
il tombe au fond de l’océan. En Méditerranée, on récu-
père 30 à 40 % des flotteurs grâce à un réseau de ba-
teaux : on change les piles, on renouvelle et recalibre
les capteurs et on peut alors les remettre à l’eau pour
un nouveau cycle de mesures. Nos collègues chinois
ont également commencé à développer un partena-
riat avec les pêcheurs dans le Pacifique Ouest afin de
recycler les instruments. Il est clairement évident qu’il
faut limiter au maximum l’impact environnemental de
nos propres observations qui visent à mieux com-
prendre pour mieux protéger. Un système est donc
en train de s’organiser à l’échelle européenne dans un
premier temps.
Sur quelle durée ce programme est-il envisagé ?
Ad vitam aeternam ! C’est l’observation de l’avenir !
L’enjeu de ce programme, c’est la durabilité, grâce
aux plates-formes et à la technologie qui vont évoluer.
Une nouvelle génération de flotteurs BGC est d’ailleurs
en cours de développement : nous allons prochaine-
ment mettre à l’eau une trentaine de flotteurs dotés
de caméras à intelligence embarquée, capables de
reconnaître les groupes de zooplancton et de trans-
mettre par satellite les résultats des analyses de cette
reconnaissance réalisée « in situ ». À termes, One Argo
sera très important pour caractériser la biologie dans
l’océan.