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SOUTENIR L'INNOVATION       | 59



          Demain, si une start-up est prête, elle peut lancer   La protection et la restauration des écosystèmes
          son projet ?                               de carbone bleu est-elle plus fédératrice ?
          Oui, il y en a une,  Running Tide qui a obtenu un   Lors de l’événement de la Monaco Ocean Week, les
          permis du gouvernement islandais pour procéder à   experts ont établi un consensus sur les bénéfices et
          des opérations sur le terrain.             l’absence de risque du carbone bleu. Les échanges
                                                     avec la salle ont montré que les collectivités étaient
          Vous avez coordonné la parution d’un guide de   désireuses d’agir et s’interrogeaient sur les mesures
          bonnes pratiques de recherche sur l’alcalinisation   à prendre, notamment sur la restauration d’herbiers
          de l’océan. Quelles sont les préconisations   de posidonies. Les solutions fondées sur la nature
          majeures ?                                 posent la question du modèle de financement, à ce
          Dans ce guide , nous estimons qu’il devrait y avoir   jour il y a beaucoup d’organisations philanthropiques
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          une bonne gouvernance et une transparence totale   qui permettent la restauration de ces écosystèmes
          des expérimentations et des données sur le sujet,   marins.
          comme nous le faisons dans la recherche. Or il n’y
          a aucune obligation pour les entreprises de le faire.   Seul bémol : tout comme les forêts, les écosystèmes
          L’industrie privée est très opaque.        de carbone bleu sont exposés au problème de
                                                     leur  impermanence.  Par  exemple,  un  herbier  de
          D’autres solutions fondées sur l’océan émergent-  posidonies peut être détruit, une mangrove coupée
          elles en matière d’atténuation climatique ?  pour faire des bassins pour cultiver des crevettes…,
          Je suis totalement favorable à la restauration des   ce qui représente une source de carbone
          écosystèmes de carbone bleu, il n’y a aucun danger à   supplémentaire dans l’atmosphère. Il faut donc
          le faire. Dans une évaluation que nous avons publiée   se montrer prudent avec la délivrance de crédits
          en 2018, nous les avons appelées « des solutions   carbone. En 2015, il y a eu une mortalité massive de
          sans regret », c’est-à-dire que même si le bénéfice   mangroves dans le nord-est de l’Australie, dans le
          en termes d’atténuation climatique est minimal, il   Queensland, liée à un phénomène El Nino : la baisse
          y a tellement d’autres bénéfices (protection de la   du niveau de la mer pendant plusieurs semaines a
          biodiversité, protection des côtes de l’érosion…) qu’il   privé tous les arbres d’eau. 40 millions d’arbres sont
          faut absolument le faire et ne pas s’interroger.   morts. Imaginons que cela ait été une mangrove
                                                     restaurée, on aurait vendu des crédits carbone alors
          En  revanche  pour  toutes  les  approches  techno-  qu’en réalité du carbone aurait été relâché dans
          logiques, comme l’alcalinisation ou la fertilisation   l’atmosphère…
          pour stimuler la photosynthèse océanique, je n’en
          promeus aucune, je suis un promoteur de la    4. Oschlies, A., Stevenson, A., Bach, L. T., Fennel, K., Rickaby, R.
          recherche. C’est pourquoi nous avons publié l’an   E. M., Satterfield, T., Webb, R., and Gattuso, J.-P., Guide to Best
                                                     Practices in Ocean Alkalinity Enhancement Research, Copernicus
          dernier un guide des bonnes pratiques, non pas   Publications, State Planet, 2023.
          pour la mise en œuvre mais pour la recherche.

          La  réduction  des  émissions  carbone  est
          formidablement difficile. Beaucoup essaient de
          trouver des solutions technologiques. Certaines
          entreprises misent sur le stockage du carbone pour
          pouvoir continuer à exploiter les énergies fossiles. Or,
          même si elles existent, si elles fonctionnent et si elles
          n’ont pas d’impact très important, les approches
          fondées sur l’océan ne remplaceront absolument
          pas la réduction des émissions carbone. On émet
          actuellement 40 milliards de tonnes de CO  par an.
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          Dans le meilleur des cas, et c’est ce que préconise
          le GIEC, les solutions technologiques pourraient
          parvenir à stocker 1 à 10 milliards de tonnes de
          carbone par an à partir de 2050.




                                                      Mésocosmes utilisés par des chercheurs de GEOMAR pour étudier les effets
                                                      de l’alcalinisation sur le plancton.
                                                      © Michael Sswat, GEOMAR Helmholtz Centre for Ocean Research Kiel
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